Trente ans que le type à la casquette a cassé sa pipe. Et voilà, enfin, un documentaire qui ne se contente pas d’empiler les dialogues qui flinguent. Dans ce portrait, il y a d’ailleurs plus d’images de vélo que de scènes de films, et plus de littérature que de cinéma.
Il était une fois, donc, un gosse abandonné du 14e arrondissement, qui passe son certif et puis c’est marre, veut devenir coureur cycliste, mais finit livreur de journaux, puis journaliste, puis critique de cinéma, puis auteur de polars, puis dialoguiste parce que les mots lui viennent plus vite que le petit blanc coule au zinc.
Il était une fois, surtout, un mec à genoux devant Rimbaud et Céline, mais faisant mine de ne pas être intello par pudeur et pour emmerder la Nouvelle Vague ; un grand désillusionné, aussi, depuis que, tout jeune homme, il fut le témoin écœuré de l’épuration, avec lynchage par les « braves gens » d’une petite nana trop peu farouche avec l’occupant et qu’il aimait bien.
Se méfier des hommes et n’en aimer qu’une poignée, telle était la ligne de conduite de ce grand partisan des « copains d’abord », qui faisait ses deuils en silence et avec de l’encre (La Nuit, le jour et toutes les autres nuits est disponible en poche).
On connaît les copains les plus célèbres : Blier, Ventura, Serrault, Gabin, Carmet, Maurice Biraud et… Mireille Darc, et ils sont tous là dans des archives épatantes et rieuses. En bonus d’intelligence : Jacques Audiard, qui décrypte si bien son père. On sort de ce documentaire ému, instruit, et moins con.